Saviez-vous que le taux de divorce explose en Tunisie ? En effet, chez nous, les « histoires d’amour finissent mal » puisqu’on est en tête de liste des pays arabes en matière de séparation. Avec justement 4 divorces prononcés toutes les trois heures, il serait difficile de nous concurrencer. Mais depuis quelques années, un nouveau modèle amoureux a pointé le bout de son museau. Il s’agit du polyamour.
1-/Polyamour ou infidélité ?
Frustration sexuelle, schéma préétabli des relations de couple, tabous autour du sexe et de la sexualité…En Tunisie, l’épanouissement amoureux est éclaboussé de préjugés et de normes. Comme toutes les sociétés patriarcales, le désir est exclusivement réservé à la sphère masculine et l’infidélité reste, pour certaines personnes, une démonstration de la virilité. Toutefois, cette archaïsme est contrebalancé par l’avènement d’une nouvelle génération fougueuse, assoiffée de vie et aux aspirations libertaires. En effet, aujourd’hui, l’amour devient pluriel c’est-à-dire qu’on n’a pas peur de dire qu’on aime plus d’une personne. C’est là qu’on met le polyamour sous le feu des projecteurs. Contrairement à l’infidélité qui présuppose cachotteries et trahisons, la règle d’or du polyamour est la transparence.
2-/Couple versus trouple
Les « polyamoureux » agissent suivant un contrat avec des règles agencées au préalable. Se greffent sur la relation « principale » des relations secondaires. Ainsi, ils suivent l’itinéraire de Jean-Paul Sartre et de Simone de Beauvoir ou encore, celui d’Henri Miller et d’Anaïs Nin. Ces deux couples d’intellectuels de la seconde moitié du XXème siècle ont trouvé un modèle amoureux qui cadre avec leur liberté. Avec un contrat qui stipule transparence, honnêteté et « compersion » -a contrario de la compassion, qui est un partage de souffrance, la compersion est l’adhésion au bonheur de son conjoint-e bien qu’on n’en soit pas la source-, le polyamour semble un moyen sain de vivre un amour pluriel, intense et épanouissant.
3-/Les limites du polyamour
Or, comme toute théorie, le polyamour a ses écueils et reste un idéal voire un fantasme. Alexandra Hubin, la sexologue de l’émission Je t’aime etc, n’omet pas de mentionner les souffrances des polyamoureux. « L’être humain est défini par son Ego. Si ce dernier se sente en danger c’est-à-dire en compétition, il sera très vite sujet à un mal-être profond ». La jalousie aussi est l’une des pires zones d’ombres au sein des couples polyamoureux comme on peut le lire dans Ethical Slut (1997), l’ouvrage de Dossie Easton et Janet Hardy. En mettant en pratique la règle du « Own your feelings », ces deux chercheurs et polyamoureux convaincus, ont démontré que le problème vient de la personne qui éprouve de la jalousie et non de son partenaire et que pour y remédier, il fallait faire un travail sur soi-même. Là encore, les avis divergent et les spécialistes, tout comme les personnes qui expérimentent cette conception du couple, restent mitigés. Peut-on réellement tolérer l’émiettement de l’amour ? Peut-on aimer deux, trois, six personnes avec la même intensité ? Caroline Weill, psychologue clinicienne à Paris, est catégorique : « l’être humain est programmé pour n’aimer qu’une seule personne. Par contre, il peut en désirer plusieurs. Il faut apprendre à faire la distinction entre amour et désir, entre attirance physique, possession et passion. »
La solution ? Et si on apprenait à communiquer avec notre amoureux/se –c’est d’ailleurs l’un des points forts du polyamour- afin de comprendre ses besoins, ses désirs et d’éviter toute forme de quiproquo. L’amour, c’est avant tout du partage. Alors qu’on soit monogame, polyamoureux ou dans une relation libre, le dialogue est de mise.
Ze Brune Patate
