C'est bien connu, en Tunisie, s'il y a un secteur qui connait "rarement " la crise, c'est bien celui de la restauration. Mais avec l'arrivée de l'épidémie du Covid-19, c'est tout notre mode de vie qui a été chamboulé.
La rédaction de Hoa s'est entretenue avec deux acteurs du marché de la restauration en Tunisie.
Amine Ben Chaabane, Brand manager chez KFC et Amine Chamas, le fondateur du Smoky Buns pour faire le point sur la situation.
Manger au restau sera-t-il de nouveau possible ?
"Vous savez, aujourd'hui tout est flou. On ne sait pas comment cette épidémie va évoluer" nous confie le fondateur de Smoky Buns.
Cet "atelier du burger" deale entre sophistication et ambiance cool afin de satisfaire le maximum de clients. Mais aujourd'hui "on a tout repensé. Surtout que notre espace est assez réduit. On ne pouvait pas se permettre de rester ouvert". Ainsi, les livraisons et le "take-away" ont très vite remplacé le service en salle, passant de 10 à 80% pour les livraisons et de 10 à 20% pour le take-away."
FB Smoky Buns
Ce changement drastique a été complété par "la nécessité d'avoir une hygiène implacable.
On désinfecte tout: la monnaie, nos habits et surtout, on tient à ce que nos livreurs N'AIENT AUCUN CONTACT AVEC LE CLIENT. Ce dernier point est assez délicat "parce que le livreur ne peut pas prendre le risque et monter jusqu'à l'appartement du client par exemple et au début, cette attitude n'était pas la bienvenue"
"On a aussi revu le menu vu la flambée des prix de certains produits." Smocky Buns
Parfois contraignants, ces gestes barrières sont pourtant indispensables pour continuer à travailler et ce, bien qu'ils ralentissent l'activité du Smoky "Si pour fumer une cigarette, on met 20min parce qu'il faut tout désinfecter après cette pause clope, alors imaginez le temps qu'on met pour préparer un burger...
Chez KFC, ces mesures d'hygiène ont toujours existé. Soucieux de la santé de leurs collaborateurs et cliens, ils ont été les premiers à fermer leurs restaurants dès la mi-mars, c'est à dire, avant que les autorités ne déclarent le confinement. Amine nous rappelle qu"avoir du gel-hydroalcoolique et respecter une distance physique entre les individus faisaient déja partie de notre quotidien bien avant l'épidémie. Le plus chez des franchises internationales comme nous, c'est le fait de pouvoir bénéficier d'expériences antérieures au niveau du groupe mondial, comme celle de l'épidémie du SRAS en Chine (2002) et d'en tirer profit afin de rebondir."
C'est notamment grâce à ce support, "que des normes de sécurité les plus strictes ont été adoptées à l'échelle mondiale ainsi que la mise en oeuvre d'un protocole de réouverture qui assure la protection des employés et des clients. "
Offre Ramadan KFC Tunisie
Une pause forcée pour se réorganiser dans l'urgence
"C'est pour cette raison qu'on a fermé pendant une semaine -la première semaine du Ramadan- pour revenir avec un esprit plus clair. Par exemple, on livre de 11h à 18h. On ne s'éloigne pas trop des zones qui entourent le Smoky Buns donc on fait la Marsa -là où se niche l'enseigne-, Gammarth Sup, Sidi Bou et les Jardins de Carthage" Amine a aussi choisi de travailler avec une équipe réduite, ce qui diminue le risque d'inadvertance et plus de communication. "On a aussi revu le menu vu la flambée des prix de certains produits. On a, par exemple, exclu la charcuterie mais aussi les aliments périssables."
On veut perfectionner le service de livraisons et le développer. Si c'est de la contrainte que naît la créativité, on n'oublie pas le côté obscur de cette situation "Je vous avoue que là, en terme de chiffres d'affaires, je ne suis pas dans l'optique du "plus". Ma priorité est de pouvoir payer les charges qu'on m'incombe et mes employés."
Du coté de KFC, à la question de la réouverture des restaurants, la réponse est assez claire "la date qui revient est celle du 24 mai mais tant qu'on n'aura pas l'aval des autorités, on ne pourra rien dire. On s'est justement mobilisé avec des franchises et des chaines locales pour créer une chambre au sein de l'UTICA. Le but est d'être représenté pour savoir quand est-ce qu'on pourrait reprendre notre business et surtout, comment on pourrait le faire."
visuel adapté pour le respect de la distanciation
M. Ben Chaabane rappelle que depuis plusieurs semaines les "équipes de qualité de KFC Tunisie et KFC Global travaillent sur la formation des équipes et la préparation des restaurants pour la réouverture dans les meilleures conditions." Cette crise a fait néanmoins naître une nouvelle stratégie, on "a misé sur la reconversion au digital. Plusieurs de nos employés vont être formés pour assurer eux même la livraison Par ailleurs, on a acceléré le developpement d'une application mobile qui permettera les prises de commandes en ligne.
Pour l'instant, nous avons maintenu les emplois et garanti les salaires de nos 250 employés mais nous n'avons aucune visibilité sur la fin de cette crise"
Le client reste un roi gourmand et généreux
"Depuis le confinement, la seule "distraction" qui nous reste est celle de déguster un bon plat. C'est pour cette raison que le client doit garder son statut de Roi. Au Smoky, on est transparent: les menus sont connus au préalable et on est très actifs sur les réseaux sociaux.
"Pour chaque repas acheté, une donation est faite au corps médical"
Amine Ben Chaabane, Brand Manager KFC
De même chez KFC,qui y voit aussi une occasion d'entraide et de solidarité,"on essaie aussi de sensibiliser le client puisque "pour chaque repas acheté, une donation est faite au corps médical". Si il est difficile en tant de crise de garder le cap vers l'essentiel, KFC Tunisie a prouvé le contraire, notamment avec le lancement de l'initiative environnementale qui vise la suppression des sacs en plastique ainsi que la mise en place des bennes de tri séléctif à l'intérieur des restaurants.
M. Ben Chaabane ajoute que "avec l'action Charity, 5000 repas ont été offerts aux communautés défavorisées".
Avec une distanciation sociale de plus d'1m8 selon les dernières estimations, même si l'OMS s'en tient au fameux "mètre obligatoire" revenir au restaurant devient de plus en plus compliqué. Mais pour l'heure, plusieurs enseignes remuent ciel et terre pour satisfaire leurs clients et pour préparer l'avenir.
Toutefois, et même si le groupe KFC a déjà connu des crises importantes ailleurs dans le monde, celle du covid-19 reste la première de cette ampleur mais la marque a déja entamé la relance post covid dans plusieurs pays par exemple en Chine, là où tout a commencé. En ce qui concerne la situation en Tunisie, aucun des deux responsables ne peut se prononcer sur l'avenir et l'expression qui revient sans cesse est "on est dans le flou".
On souhaite du courage et de la force à nos entrepreneurs.
Fatma SG
