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07 Janvier 2020

En Tunisie, être un homme mannequin c'est me prendre pour une tapette !

En Tunisie, être un homme mannequin c'est me prendre pour une tapette !


 

 Ayant bossé dans la mode pendant plus de deux ans, j’ai été amenée à côtoyer des mannequins. J’étais une sorte de grande sœur bienveillante dans un milieu où les fais vite ! ,  jette ça ,  souris  réussissaient à étouffer les larmes.

 

 


 

Flashback poignant

 

 

Hier, Hkeyet Tounsiya, le ça se discute tunisien, a recueilli les propos de cinq mannequins tunisiens. Deux jeunes hommes et trois jeunes filles, aux parcours « fabuleux », ont fait part au public de leurs expériences. Le bémol, c’est que le monde du mannequinat n’est pas aussi féerique qu’il n’y paraît. Pire encore, à l’heure du hashtag  #Enazeda, l’omerta autour du harcèlement au masculin persiste. En 2018, justement, un mannequin, Mohamed S. ; a parlé dans les colonnes du magazine de mode FFDESIGNER de la  pression qu’il avait subi pendant le concours Metropolitan –un concours de mode aussi répandu que celui de l’agence Elite- , une pression qui est teintée d’ insistance et de messages suggestifs, d’ordre sexuel . Il faut croire que les Terry Richardson à la tunisienne existent et qu’ils sont aussi bien férus de jeunes filles que de jeunes hommes. Mais le rabaissement ne s’arrête pas là.  Tu savais qu’on nous payait moins que les mannequins à l’étranger et qu’il nous arrivait de ne pas être payés ?  m’a lancé une fois, Louai ElFatmi. En effet, ce petit protégé de Sofia Guellaty, journaliste mode et fondatrice du magazine Milles est la STAR de la Fashion Week tunisienne. Toutefois, cette starification ne le protège pas des tentatives d’amadouement qui consistent à troquer l’argent contre une fringue ou un produit haut-de-gamme. 

 

  

 

Aucune association tunisienne ne protège les mannequins, comme si ce qu’on faisait n’était pas sérieux. C’est triste. Et même si on voulait partir à l’étranger, il nous faut de l’argent et surtout, une légitimité. Or, ici, j’ai l’impression qu’on t’exploite, surtout si tu es un mec

 

 

 

 

Comme si le mannequinat dévirilisait les hommes et que, bien qu’ils aient de la gueule et du potentiel, ils ne pourraient pas échapper à la dure loi du marché.

 

 

 

 

Louai El Fatmi

 

 

Virilité en péril ?

 


 

 J’ai l’impression que, parce que je prends soin de moi, je passe pour une tapette !  Mohamed S,. ne mâche pas ses mots. En effet, l’image que la majorité a des mannequins hommes est éclaboussée de préjugés. Héritage culturel oblige, un homme qui prend soin de lui est automatiquement catalogué comme efféminé, une sorte de Toy Boy qui ne sert qu’à amuser la galerie.  Oui, j’en souffrais mais aujourd’hui, ce détail constitue ma force.

 

  

 

Louai El Fatmi


 

Il y a pourtant des jeunes designers qui essayent de tordre le cou à ses clichés. Se superposent sur les silhouettes masculines ultra-virilisées, musclées à souhait et bronzées, des silhouettes androgynes, des bouches maquillées, des visages fardés.  La mode est belle et dépasse le concept du genre . C’est ainsi que Anissa Meddeb voit sa dernière collection.

 


 

Le cas Ali Latif

 

 

 

Contrairement à Azza Slimene qui était très médiatisée suite à sa participation, depuis deux ans, à la Fashion Week de Paris et à son ascension fulgurante dans le monde de la mode, Ali Latif, jeune mannequin tunisien de 22 ans qui vit entre Paris et New-York et qui a un peu plus d’ancienneté dans le milieu que Azza, n’a pas été autant applaudi par ses compatriotes tunisiens. Pourquoi ? Parce que c’est un garçon et que la beauté, les fringues, le glamour bref, ce moundou est, injustement, monopolisé par la gente féminine. Les hommes s’intéressent peu ou prou aux Fashion Week masculines et encore moins aux new faces –d’où la création de défilés mixtes et la déconstruction du genre afin de donner de la visibilité à la communauté LGBTQ+ tout en décomplexant les hommes hétérosexuels quant à la mode-. D’ailleurs, le mannequinat est l’un des rares milieux où la femme est beaucoup plus payée que l’homme. Justement, connait-on des Gisele Bundchen ou des Claudia Schiffer hommes ? Pas vraiment.

 

 

 

Alors ?

 


 

Même si les hommes s’intéressent aujourd’hui un peu plus à la mode, revendiquer sa passion pour ce milieu et pour les acteurs de ce milieu est susceptible de mettre en doute les marqueurs triomphants de la virilité lambda et ce, à cause d’un héritage social poussiéreux qui mériterait d’être updaté. Hurry up ! Que la révolution vers l’égalité des sexes se mette en marche illico presto.

 

 

Ze Brune Patate

 

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